Commissionnaire/représentant en douane : remboursement des frais avancés sans faute dans la répercussion au client des difficultés
Affaires - Transport
14/12/2022
Le client du représentant en douane doit lui rembourser le montant des frais qu’il a avancés – amende et droits et taxes redressés –, à défaut de prouver une faute de ce dernier dans l’exécution de son mandat, selon un arrêt de la cour d’appel de Lyon du 1er décembre 2022 qui, à propos d’un laser ophtalmologique, donne sa « vision » notamment de la répercussion utile au client par ce représentant des difficultés rencontrées avec la Douane du pays d’importation et opère des rappels classiques, mais utiles.
Une société, qui a pour objet l'export de matériel médical, a confié à un représentant en douane mandat de la représenter auprès de la Douane marocaine pour l'accomplissement des formalités douanières s’agissant de l'acheminement d'un laser ophtalmologique à destination d’un médecin au Maroc. Cette administration, estimant que la valeur de la marchandise avait été minorée, a procédé à sa réévaluation et réclamé le paiement d'une amende pour fausse déclaration, ainsi que le versement de droits et taxes supplémentaires. Après des échanges sur ce point avec sa cliente, le représentant en douane, qui les a acquittés, les lui a ensuite refacturés. Pour échapper au paiement/remboursement des avances et frais de son mandataire, la société exportatrice mandante avance, mais en vain, les fautes ci-dessous du représentant en douane dans l’exercice de ses missions. Au contraire, pour le juge, ce dernier les a correctement remplies au regard des dispositions du code civil relatives au mandat et la société doit donc, en l'absence de manquement contractuel du représentant en douane/mandataire, rembourser les sommes avancées par lui à la Douane – l'amende pour minoration de valeur et les droits et taxes – au titre de l’article 1999 de ce code, le représentant justifiant les avoir réglés.
Répercussion à l’exportateur par le représentant en douane des informations relatives aux problèmes rencontrés
Pour refuser le remboursement, la société invoque une faute du représentant sur ce point. Mais pour le juge, ensuite du contrôle de la Douane marocaine, le représentant en douane justifie (courriels à l’appui) avoir contacté et échangé avec sa cliente pour lui indiquer :
d’abord, la réévaluation opérée par cette administration et le délai pour accepter ou non la valeur réestimée ;
ensuite, le détail des estimations faites par cette administration concernant le montant de l'amende en douane, des honoraires supplémentaires d'inspection et des droits de douane sur la valeur (un message fait également état des frais supplémentaires liés au stockage de la marchandise au Maroc ; voir ci-dessous) ;
et enfin, le courrier définitif de la Douane marocaine.
Pour le juge toujours, loin d’être une faute, ces échanges prouvent que le représentant en douane a rempli sa mission « consistant à répercuter à son mandant, dans un délai lui donnant la possibilité de formuler utilement ses observations, le problème de la valeur minorée du bien exporté, tel que relevé par l'administration des douanes marocaines dans le cadre de la réalisation des formalités douanières, afin de lui permettre ensuite de prendre position sur la réévaluation opérée et les conséquences en découlant, après avoir, le cas échéant, produit tous justificatifs utiles complémentaires sur la valeur dudit bien ».
Refus par le représentant en douane de livraison au destinataire final et de restitution au client : pas de faute, mais une simple exception d’inexécution du contrat
Pour refuser le remboursement, la société exportatrice reproche aussi à son mandataire de refuser de livrer la marchandise au destinataire, puis de la lui restituer. En revanche, pour le juge, ce refus n’est pas lié aux conditions de mise en œuvre du mandat en lui-même, mais s'analyse en une exception d'inexécution de la part du représentant en douane, « valablement fondée sur le refus illégitime de son mandant de lui rembourser les sommes avancées » caractérisant un motif suffisant de rétention du matériel litigieux par le mandataire (alors au surplus que la question de frais de stockage avait été évoquée par le représentant auprès de sa cliente qui n’avait pas répondu s’agissant de leur règlement ; voir ci-dessus). Le juge relève d’ailleurs que la société est « mal venue » à avancer un refus de restitution de la marchandise alors qu’elle a indiqué par courrier à son représentant abandonner/se désister de la marchandise stockée dans les entrepôts de celui-ci.
Trois remarques Rôle du commissionnaire/représentant en douane (rappel général). – Selon le juge, il « doit, en sa qualité de professionnel de la réglementation douanière, accomplir les formalités douanières d'importation ou d'exportation pour le compte de son client, ce qui suppose qu'il recueille les informations nécessaires sur la marchandise pour pouvoir remplir les différentes déclarations et effectuer les formalités qui s'imposent en fonction des informations obtenues. Il lui appartient de veiller à ce que la déclaration qu'il effectue soit conforme à la réglementation douanière en vigueur, au vu des informations transmises par son client ». Le juge ajoute encore que « la mission du représentant en douane est de procéder à l'ensemble des déclarations douanières imposées par la législation en vigueur dans le pays concerné, sur la base des justificatifs communiqués par le mandant. Il ne saurait en revanche lui incomber de porter une appréciation sur la valeur intrinsèque du matériel exporté et d'attirer l'attention de son mandant sur les difficultés susceptibles de survenir en cas de minoration de la valeur ». Devoir de conseil. – Toujours selon le juge, le représentant en douane a « une obligation de conseil, laquelle s'apprécie largement, en tenant compte de la plus ou moins grande spécialisation du commettant en matière douanière mais ne se conçoit que dans le cadre de la mission qui lui est dévolue. » Mission sans contrat. – En l’espèce, les parties s'accordent sur le mandat confié au représentant en douane sans toutefois présenter de contrat sur le fondement duquel l'opération a été effectuée, seule la facture émise par ce dernier et réglée par sa cliente au titre de cet acheminement jusqu'au Maroc étant produite : aussi, selon le juge, en l'absence de toute convention écrite régissant leurs rapports contractuels, il convient de se référer aux seules dispositions du Code civil sur le mandat afin de déterminer le rôle de chacun des cocontractants et apprécier l'existence de la faute contractuelle du mandataire invoquée par le mandant.
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